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mercredi 31 juillet 2024

Venezuela: au moins 12 morts dans les manifestations contre la réélection de Maduro


 Caracas – Au Venezuela, des partisans de l’opposition sont de nouveau descendus dans les rues par milliers mardi pour protester contre la réélection de Nicolas Maduro. Depuis lundi, les manifestations qui secouent le pays ont fait au moins 12 morts

Des milliers de partisans de l’opposition sont descendus dans les rues mardi 30 juillet au Venezuela pour revendiquer la victoire à la présidentielle de leur candidat, qui a interpellé l’armée et le pouvoir de Nicolas Maduro après la mort d’une douzaine de personnes et des arrestations massives.

Depuis le scrutin de dimanche, un bras de fer est engagé entre le pouvoir socialiste et autoritaire, aux commandes depuis 25 ans, et l’opposition. Elle dénonce une « fraude massive » et exige un dépouillement transparent des votes, réclamé avec de plus en plus d’insistance par la communauté internationale.

Aux cris de « Liberté, liberté ! », des sympathisants du candidat Edmundo Gonzalez Urrutia et de la cheffe de l’opposition Maria Corina Machado se sont rassemblés à Caracas et dans d’autres villes du pays pour contester la réélection annoncée de Nicolas Maduro pour un troisième mandat. « Nous devons rester dans les rues, nous ne pouvons pas nous laisser voler nos voix aussi effrontément », a dit à l’AFP Carley Patino, une administratrice de 47 ans.

Le candidat Edmundo Gonzalez Urrutia, un diplomate discret de 74 ans qui a remplacé comme candidat Maria Corina Machado, déclarée inéligible, a interpellé directement les forces armées. « Il n’y a aucune raison de réprimer le peuple du Venezuela », a-t-il lancé devant ses sympathisants dans la capitale.

« Diables » et « démons ». En réponse, Nicolas Maduro a accusé l’opposition d’être « responsable de la violence criminelle », lors d’une réunion regroupant les plus hautes instances dirigeantes. « La justice passera contre les diables et les démons », a-t-il averti devant plusieurs centaines de personnes qui ont marché jusqu’au palais présidentiel pour lui apporter leur soutien. Il a tonné contre « le fascisme » et ciblé son rival, le traitant de « Monsieur le lâche ».

Cette nouvelle crise s’ouvre alors que le Venezuela, longtemps un des pays les plus riches d’Amérique latine, est déjà exsangue, empêtré dans une crise sans précédent : effondrement de la production pétrolière, PIB réduit de 80 % en dix ans, pauvreté et systèmes de santé et éducatif totalement délabrés. Sept millions de Vénézuéliens ont fui le pays.

Depuis lundi, le bilan des manifestations est d’au moins 11 civils tués, dont deux mineurs, selon quatre ONG de défense des droits humains. Alfredo Romero, responsable de l’ONG Forum pénal, s’est dit inquiet de « l’usage d’armes à feu ». Le procureur général Tarek William Saab a fait état d’une 12e victime, un militaire tué par balle.

Arrestations pour « terrorisme ». L’Enquête nationale sur les hôpitaux, une ONG, a dénombré en outre 84 civils présentant des blessures, tandis que le ministère de la Défense a évoqué 23 militaires blessés. Le parquet a fait savoir que « 749 délinquants » avaient été arrêtés dans le cadre des manifestations, certains pour « terrorisme »

Dans ce contexte, l’opposition dénonce une « escalade de la répression » et a annoncé l’arrestation d’un de ses cadres, Freddy Superlano. Pilier du pouvoir sous le président Hugo Chavez de 1999 jusqu’à sa mort en 2013, comme sous son dauphin Nicolas Maduro, l’appareil sécuritaire tient entre ses mains une bonne part du destin du pays. Le ministre de la Défense, le général Vladimir Padrino, a d’ores et déjà « réaffirmé » la « loyauté absolue » des forces armées au président Maduro.

Nicolas Maduro, 61 ans, a été officiellement proclamé lundi président, après l’annonce de résultats par le Conseil national électoral (CNE). Sans fournir le détail des résultats, le CNE a affirmé que M. Maduro a obtenu 5,15 millions de voix (51,2 %), devant Edmundo Gonzalez Urrutia, 4,5 millions de voix (44,2 %). Mais l’opposante Maria Corina Machado assure que l’opposition dispose des « preuves de la victoire » grâce à la compilation de procès-verbaux. Selon elle, Edmundo Gonzalez Urrutia a obtenu 6,27 millions de voix (73 %), contre 2,7 millions pour M. Maduro.

Maduro isolé. Ce dernier peut se féliciter du soutien de la Chine et de la Russie, mais il apparaît de plus en plus isolé. Washington a jugé mardi « inacceptable » la répression et le Haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Volker Türk, s’est dit « extrêmement inquiet ». Le chef de la diplomatie de l’Union européenne, Josep Borrell, a réclamé « le plein respect » du droit de manifester.

En Amérique latine, c’est une onde de choc. L’Organisation des Etats américains (OEA) a dénoncé « une manipulation aberrante » lors du scrutin. Neuf pays d’Amérique latine (Argentine, Costa Rica, Equateur, Guatemala, Panama, Paraguay, Pérou, République dominicaine, Uruguay) ont appelé dans une déclaration commune à un « réexamen complet avec la présence d’observateurs électoraux indépendants ».

Caracas a réagi en retirant son personnel diplomatique de sept pays latino-américains. Le Pérou a reconnu le candidat d’opposition comme président légitime, et le Costa Rica lui a offert l’asile politique, comme à l’opposante en chef. Le président mexicain de gauche Andrés Manuel Lopez Obrador, de son côté, a demandé de « ne pas se mêler » des affaires du Venezuela, tout en plaidant pour la transparence sur les résultats.

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